jeudi 19 février 2009

"A l'Ombre d'Agamemnon" par Trendance

Tour à tour singe pitoyable et lion indomptable,
Janus du bon nègre et du tyran africain,
Tes deux masques donnaient toujours sans jamais recevoir,
Coups répétés dans une ivresse frénétique:
Au zinc d'un café de banlieue,
Au coeur et au corps d'une famille éthérée.

Mais à mes yeux, plus que tout autre animal,
Tu as été l'oiseau migrateur, Hermès aigre doux,
Annonçant la chaleur récomfortante du bien-être
A laquelle succédait, sans transition,
La torpeur glaçante de la maltraitance.

J'étais Autre, ni noir, ni blanc,
En dehors des modèles de ton enfance,
Etranger à un adulte flou qui ne s'est jamais cherché.
J'étais surtout enfant d'un désamour, d'un pacte aussi absolu qu'ésotérique
Que tu avais signé avec la taire mère.

Et malgré cela, en même temps que je te craignais, je t'aimais:
Constamment trahi par mon meilleur ennemi,
je me heurtais irrémédiablement à ton mépris,
Symptôme de ta passion pour la haine viscérale que tu cultivais envers moi.

Mais maintenant que tu as descendu la rivière sans retour,
Que je ne crains de toi ni haine, ni courroux,
Que je mesure le mutisme abyssal qui nous séparait,

L'oeil cyclopédique du Père continue d'hanter mes nuits et d'illuminer mes jours.

Trendance

mercredi 29 octobre 2008

"Rencontre avec Toi" par Trendance

Ce jour-là, au pied de l’arc-en-ciel de ton Absence,
Ta silhouette, ta voix, ton nom, ta présence…
Tout portait l’éclat aveuglant du rayon d’évidence,
Un cri déchirant le silence immense,
Une vérité chassant la morne ignorance,
Un soleil me guidant hors de mes anciennes errances
Un onguent effaçant mes plus intimes cicatrices...
Et mon être tout entier soudain devinait les délices du calice,
Les douceurs innombrables de la corne d’abondance.
Ce jour-là, Frédérique, tu n’étais pas encore entrée dans mon existence
Que déjà je ne voulais plus jamais t’en voir sortir.

Trendance

lundi 20 octobre 2008

"La "contre-addiction" américaine" par Trendance

Si les Etats-Unis n'ont pas le monopole de la contradiction, ils en ont fait depuis bien longtemps un de leurs traits essentiels. Cette tendance est si récurrente que l'on pourrait se risquer à parler d'addiction à l'incohérence. Après le déficit budgétaire abyssal de la première puissance mondiale (mais l'est-elle encore à ce jour) et le rôle d'agent de sécurité planétaire d'une nation rongée par la violence armée et le traffic de drogues, la nouvelle contradiction réside dans l'association de cinq lettres: Obama.
Dernier sursaut pragmatique d'un pays résolument idéologique, désir d'une revanche prise sur l'histoire raciale exprimée par l'une des deux Amériques ou contre-pied d'une nation éprise d'avant-garde, je ne saurais le dire. Ce qui est certain c'est que les Etats-Unis, qui ont aboli la traite et l'esclavage des noirs bien après l'Angleterre et la France, continuent de surprendre en étant l'un des premiers pays occidentaux à soutenir la candidature d'un citoyen issu de l'immigration. Contradiction, quand tu nous tiens!..

A la fois instrument ultime d'égalité et condition sine quan non à la renaissance, la mort - ici de l'Amérique telle que l'on a pu la connaître et de la race - a bien souvent été annoncée depuis l'investiture démocrate de Barack Obama et beaucoup y ont vu l'entrée des Etats-Unis dans l'Ere du Verseau racial et social. Mais qu'en est-il réellement? Cet événement, ayant à la fois valeur de rupture et de contradiction, redéfinit-il fondamentalement l'Amérique? Constitue t-il un "événement" dans le sens foucaldien, c'est-à-dire un fait historique singulier et contingent?

La mort est omniprésente dans notre quotidien, comme dans les champs de connaissance. Ainsi, à la fin du dix-neuvième siècle, Nietzsche invoquait déjà la mort de Dieu. A la même époque, Karl Marx annonçait la mort prochaine du capitalisme. Le siècle suivant, Michel Foucault proclamait la mort de l'Homme et les années soixante-dix célébraient la mort de l'Histoire. Les années quatre-vingt dix firent le deuil du Communisme. Au moment où l'on semble vouloir enterrer le libéralisme et ses effets pervers, l'Amérique entérine une nouvelle rupture avec Barack Obama, même si c'est l'Europe qui la voit plonger dans l'Age post-raciale.


Même s'il s'agit d'une indéniable avancée, nous sommes bien loin de la mort de l'Amérique racialisée. Aussi l'avènement de Barack Obama en tant que prétendant noir au fauteil de la Maison-Blanche doit-il être remis en perspective. Répondre à la question de l'essence noire devient donc une priorité.


Les Etats-Unis sont l'agrégation de nombreuses réalités sociales. Parmi elles, le Sud stipulait dans son arsenal législatif qu'un individu était considéré comme noir s'il possédait 1/32è de sang noir. Mais ceci va plus loin: de par la nature de l'histoire américaine, la négritude fonde une filiation à part entière qui plonge ses racines dans l'esclavage. Ainsi, la société américaine continue d'en porter en son sein les stigmates. Il n'est donc pas étonnant de relever qu'aujourd'hui encore les concepts et réalités de race et de rang social sont intimement liés dans un pays où le lumpenprolétariat et autres laissés pour compte sont à grande majorité noirs.

C'est dans cette perspective qu'Obama affiche une particularité contradictoire qui entame son statut de candidat noir américain. En effet, au-delà de son métissage, il est aussi noir qu'il n'est pas africain-américain. La spécificité d'Obama ne tient donc pas dans le fait qu'il représente un candidat noir mais plutôt qu'il ne soit pas un candidat africain-américain. En regardant Obama, l'Amérique blanche oublie tout du fardeau de la responsabilité que lui fait porter son passé esclavagiste. Au contraire, ce faisant, elle goûte avec délectation à la suave légèreté et à la fierté que confère le rêve américain. Par delà l'admiration béate pour une nation prête à se porter à sa tête un noir, l'enseignement que l'on peut tirer d'un tel événement réside dans le fait que l'Amérique se sente plus proche d'un partenaire aux origines pour certaines lointaines que d'un compatriote au passé marqué par l'abomination raciale.
Dans le même temps et ceci ne constitute aucunement la dernière contradiction inhérente au succès de Barack Obama, ce dernier incarne le rêve américain et l'américain en tant que tel, cet être multi-ethnique que Saint John de Crèvecoeur a défini comme "le nouvel homme". Ce concept ne trouve t-il pas un écho dans la maxime "e pluribus unum", un issu de plusieurs?

Mais comme toutes les nations, l'Amérique est en marche. Néanmoins, il semble que cette dernière évolue à contre-courant d'un monde qui semble préférer adopter les modèles d'un passé conquérant et/ou rassurant. Ainsi, la France tente de mettre en oeuvre la politique libérale anglo-saxonne des années quatre-vingt tandis que la Russie se tourne résolument vers des référents communistes d'avant 1989. L'Amérique, quant à elle, est toujours animée par une logique moderniste: elle se projette dans l'avenir, hautement consciente qu'elle est d'écrire l'Histoire. Elle se délecte de l'émisson de sa propre image réfléchie par le miroir de l'avant-garde. Toutefois, tandis que l'Amérique tente de se persuader de la possible concrétisation de ses propres mythes d'égalité, un événement démographique plus subtil se prépare à déferler sur la démocratie américaine. Selon les projections du Bureau du recensement américain, les minorités américaines deviendront majoritaires vers 2042. Cette donnée annonce t-elle la mort de l'Amérique? La seule garantie, c'est que ce n'est pas là la dernière contradiction américaine car cette nation, plus que n'importe quelle autre au monde, n'en finit plus de mourir pour mieux se redéfinir.

Trendance

vendredi 10 octobre 2008

"Rêverie d'un promeneur citadin" par Trendance

Ce matin, j’ai une plume dans les yeux,
Léger, posé, heureux,
Je nargue la froideur affichée de ce mannequin envieux
Et vogue sur la mélancolie assumée de la lascive banlieue.

Ce matin, j’ai le cœur à la confluence du sourire,
Mon être irradie de bonheur ce qui hier me semblait le pire,
Et pourtant, je rêve de me lover dans le songe duquel plus jamais je ne voudrais sortir.

Trendance

"L'Ere du grand Divorce sociétal" par Trendance

Nous voici au "coeur" d'une crise financière d'un genre nouveau, dans l'oeil d'un cyclone économique dévastateur; et avalés tels quels par la baleine de Collodi, nous nous surprenons à chercher à allumer un feu salvateur... Mais heureusement, c'est coupés du monde que nous est offerte l'opportunité de comprendre que c'est notre égocentrisme et le manque de considération pour autrui qui nous ont conduit tout droit à cet isolement. La phobie, quoiqu'essentiellement irationnelle, peut devenir le point de départ d'une réflexion dont les conclusions s'avèreront cruciales quant aux mesures à prendre.
Il est souvent dit que le plus dur ne consiste pas à devenir champion mais à le demeurer. Confronté à une crise majeure, le capitalisme, frappé du syndrome Achillien, témoigne aujourd'hui de la pertinence de cet adage; beaucoup ont vu dans la Chute du Mur de Berlin de Novembre 1989 la victoire incontestable et alors incontestée d'un capitalisme désormais triomphant. Mais notre système, aveuglé par les phares du cynisme et d'une invulnérabilité faussée, a perdu de vue que déjà un défi de taille se profilait à l'horizon, celui de la transmutation. Sorti du long contexte historique de la Guerre Froide, la superstructure capitaliste a éludé le grand principe darwinien reposant sur la nécessité de s'adapter à un nouvel environnement. Au lieu de profiter de la trêve en investissant dans l'humain les anciennes ressources militaires, le monde occidental de type capitaliste a cru assurer sa propre pérennité en privilégiant la consolidation de sa propre superstructure. L'inertie, ce mythe pourtant éprouvé, a été brandi et tout fut mis en oeuvre pour que le pouvoir demeure entre les mains de ceux qui le gardaient jalousement. La contre-révolution n'avait qu'à bien se tenir...
Et lorsque le changement nous était proposé, le prétexte était tout trouvé: l'Union Européenne se devait de constituer le dernier rempart face aux assauts répétés de l'Amérique, de l'Asie et de l'Afrique. Vagues immigratoires et autres stratégies économiques agressives se devaient d'être contenues à l'heure où la vieille Europe avait besoin d'un influx de jeunes travailleurs et où la libre-concurrence internationale était pronée. Contradiction, quand tu nous tiens!.. L'Euro avait alors pour objectif de nous protéger de tout aléa, d'assurer la stabilité monétaire et financière de notre zone-forteresse. Stabilité, inertie, préservation...
Mais dans le même temps, un autre son de cloches pouvait être perçu: des pays et continents environnants, le son discordant de la globalisation semblait devoir venir altérer nos infrastructures. Ce qui avait été produit ici et consommé là-bas était brutalement produit là-bas et consommé ici. Mais comment lutter contre cette hydre, contre ses dragons venus d'ailleurs? Après moultes réflexions, la superstructure capitaliste n'a eu d'autre choix que de s'allier à cette menace, de l'admettre en son sein, consciente qu'elle était de ne pouvoir la terrasser. Et tous les décideurs politiques et économiques de se bousculer afin de prendre le train en marche, frappés qu'ils étaient par un strabysme déconcertant: l'oeil droit faussement rougi par la désindustrialisation de nos régions et la dépression de nos cols bleus, l'oeil gauche avidement pointé vers les terres lointaines de la délocalisation et de l'externalisation: fuite des capitaux, évasion fiscale, transfert des procédures et des compétences, vente des moyens de productions... Sous prétexte de se renforcer, le capitalisme nous a tous affaiblis. Convaincu de conforter sa primauté, cette superstructure a entamé une procédure de divorce avec ceux mêmes qui forment ses administrés, c'est-à-dire Nous.
C'est ainsi que nous devons faire face à une crise rare: crise de confiance subie par les places boursières du monde entier, crise de méfiance au sein du secteur bancaire mondial. Non, le système capitaliste n'est pas confronté à une récession mais à une véritable crise des valeurs. Car la vigilance et la clairvoyance ne doivent pas faire en sorte que nous nous satisfassions d'un terme qui vise parfois à masquer les responsabilités. Certes cyclique, la crise s'explique et procède de causes définissables. Hormis les explications techniques imputables à un Capitalisme triomphant, il en est une - philosophique - que l'on peut se risquer à évoquer: le Divorce.
Cette crise n'est autre que la résultante d'une tendance sociétale en ce sens qu'elle est décelable à chaque niveau, dans chaque aspect de ce qui fait notre quotidien. L'employeur privilégie la rentabilité au détriment du bien-être de ses employés, l'Etat sacrifie la priorité de service à des fins d'économie, l'(in)satisfaction des désirs prend le pas sur la quête du bonheur, l'égocentrisme est implicitement institutionnalisé aux dépens de la solidarité et le surendettement devient une manne pour les prêteurs faussement généreux. Mais le grand Divorce, monstre protéiforme ne s'arrête pas là: il érige dans son sillage des murs infranchissables: l'élève se détourne de son professeur, l'enfant façonne ses parents en anti-modèles, l'admistrateur fait fi de ses administrés... En d'autres termes, c'est une crise de confiance généralisée qui nous menace dans ce que nous sommes, au plus profond de notre communauté mais aussi de notre être. Car s'il est une chose que le Capitalisme triomphant a perdu de vue, c'est que la qualité d'un contrat ne vaut que par la satisfaction pleine et entière des intérêts des deux parties. La falsification des bilans d'Enron, le scandale des 'subprimes', la spéculation incessante portant sur le prix des ressources pétrolières et alimentaires, les diverses stratégies d'évitement du système bancaire et du monde de l'assurance sont autant d'exemples de violation du contrat sociétal.
Et pourtant, ne nous a t-on pas répété que nous vivons à l'heure du "tout globalisé"? Comment ce système capitaliste qui a cautionné la globalisation à ses propres fins de survie a t-il pu oublier qu'il n'est pas de salut sans altruisme, c'est-à-dire la prise en compte de l'Autre? Est-il possible que l'interdépendance lui ait semblé ne plus constituer un trait fondateur de notre monde? Est-il envisageable que, enfoncé dans une avidité démesurée, le Capitalisme ne se soit pas rendu compte qu'il broyait et digérait ses propres enfants, tel un Saturne croyant ainsi assurer sa propre survie? Ce divorce trouve également un écho dans la rupture écologique qui oppose l'Homme à son environnement. A nouveau, perdre de vue l'interdépendance, la relation à l'Autre, c'est se aborder soi-même, fuir éperdument tout en coupant les ponts d'un retour possible au bien-être. Plus, toujours plus! Plus vite, plus haut, plus fort! C'est la dure loi des records, ces vieux bilans à effacer des tablettes de l'Histoire et de la mémoire collective. C'est ainsi que le sportif déçoit parfois ses plus fervents admirateurs et que le commercial ne fait plus de son client le principal bénéficiaire du service qu'il offre.
Et pourtant, ce sens de l'interdépendance n'est pas du domaine du mythe. Chaque "petit pas pour l'homme (...) est un grand pas pour l'humanité." Comme l'avait affirmé Neil Armstrong, chaque homme recèle d'une parcelle non seulement d'humanité mais également de l'humanité.
Le pire réside peut-être dans le fait que le système en est conscient, voire convaincu car, à l'instar d'une publicité conçue par un opérateur téléphonique, il n'hésite pas à clamer (toujours plus) haut et (toujours plus) fort dans des messages aussi démagogiques que cyniques que "je suis tous les gens que je connais et tous ceux que je ne connais pas encore. Je ne suis rien sans eux et avec eux je peux tout faire". Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le slogan de cette entreprise est "plus loin ensemble", la parfaite illustration d'une surenchère de la performance teintée de démagogie nauséabonde. Comble de l'ironie, bien avant l'ère digitale, les hommes vivaient déjà en réseau, au sein d'un enchevêtrement communautaire et d'un tissu social qui les préservaient du grand Divorce sociétal. Car si pour Sartre, "l'enfer, c'est les autres", nos aïeux avaient bien compris que, quelque part, le salut résidait dans les autres!

Trendance

vendredi 12 septembre 2008

"Points de vue: myopie et voyeurisme ou le déni de soi" par Trendance

Résidant en proche banlieue parisienne, je passe en moyenne dix heures par semaine dans les transports en commun, qu'il s'agisse du métro, du RER ou du bus. Comme bon nombre de personnes, je profite de ces moments pour me retrouver, alors même que je me trouve balloté dans une foule d'inconnus. Lorsque je ne lis pas de romans classiques, il m'arrive de ressentir le besoin de penser. Dans l'environnement froid des non-lieux du transport public, j'aime à structurer mentalement mon existence ou à me projeter dans un avenir dont les fondations sont à ériger. Mais parfois, comme bon nombres de "voyageurs" - peut-on parler de voyage lorsque la contingence et l'errance en sont exclues? - je me laisse aller à observer mes semblables et cette activité en dit long sur l'essence de notre société.
Etat de somnolence motivé par un manque de sommeil, rêverie salvatrice qui vous extirpe temporairement d'un quotidien déshumanisant, écoute d'un appareil MP3 qui vous confère à la fois isolement relatif et sensation d'être chez soi, lecture d'un livre ou d'un journal gratuit, conversation téléphonique dont la vacuité indique que le message est moins important que la nécessité de gaspiller le temps: ce sont là les grandes tendances comportementielles.
Néanmoins, il en est une que je n'ai pas mentionnée et qui pourtant me fascine autant qu'elle se propage dans les espaces publics: la "lecture" des magazines "people".
En ce début du troisième millénaire, notre société se distingue entre autre par la fascination exercée par les célébrités. Emissions télés, sites internet et presse mondaine se spécialisent avec un enthousiasme frénétique pour cette frange "dorée" de la population, au point que ce terme anglais trouve dans la transcription "pipôle" un pendant branché. Mais comment ne pas voir en "people" un des termes les plus ironiques qui soient? En effet, si les objets de ce nouveau culte sont des "people", c'est à dire des "gens", il est légitime de se demander ce que nous, les anonymes, qui composons "la France d'en bas", sommes.
Les choses ont véritablement changé depuis les années quatre-vingt. Après une longue période de doute engendrée par le choc pétrolier de 1973, la neuvième décennie du vingtième siècle s'est lentement imposée comme l'ère de l'individualisme pleinement assumé, voire revendiqué. Les années deux mille ne sont qu'à cet égard le prolongement des années quatre-vingt. Toutefois, une chose a changé: l'insouciance de l'embellie écononomique a laissé la place au marasme de la précarité et de la perte du pouvoir d'achat. Nous sommes donc devenus des consommateurs fantômes, frustrés car bridés par la retenue vitale occasionnée par un porte-feuille "idéal", ou devrais-je dire, un "porte-deuil". Nous sommes prisonniers de nos désirs inassouvis, reclus dans un quotidien que beaucoup ressentent comme sinistre et sans perspective. Mais, des années quatre-vingt, une chose semble perdurer même si elle a muté: cette culture de l'ego. Mais comment faire l'apologie de soi lorsque l'on ne trouve plus de raison d'être fier de ce que l'on est?
Deux solutions s'offrent alors: sombrer dans un culte de la personnalité aussi futile que ridicule ou fuir ce que l'on 'est pour se réfugier dans l'Autre, dans le "people. C'est donc ainsi que dans une société de plus en plus individualiste on ne s'intéresse principalement qu'à l'Autre. En se lovant dans les pages de papier glacé d'une presse agréable mais illusoire, nous, les vraies
personnes, menons une vie fantasmée au cours de laquelle s'entremêlent myopie et voyeurisme. En consultant les média spécialisés, nous nous régalons de biens de consommation et de scènes de vie aménagées, qui n'ont pour seul but d'attiser notre soif d'onirisme et notre tendance à l'onanisme mental. Reportage photo de candidats à l'élection présidentielle entourés de leur famille dans le jardin de leur résidence secondaire, double-page consacrée à des artistes qui, sous prétexte d'une actualité brûlante, se pavanent au lit, affublés d'un plateau petit-déjeuner sur lequel se trouvent des croissants parfaits, une fleur fraîchement coupée et un jus d'orange qui ne sera jamais bu... La famille Ricorée a encore frappé dans l'imaginaire de la presse à scandales. Mais de quels scandales parle t-on? De ces autres photos faussement scandaleuses car arrangées mais présentées comme l'oeuvre outrancière de paparazzi sans vergogne? De ces photos légèrement floutées sur lesquelles apparaissent des stars en bikini supposément parfaites mais dont on ne peut râter la cellulite? Comme le dit le dicton, qui aime bien, châtie bien. On se doit de présenter les people commes des gens normaux qui sont, tantôt élevés au rang de héros de par leur accession au succès, tantôt considérés comme des victimes sacrifiées sur l'autel de la célébrité. En somme, les people se doivent de ne pas nous laisser indifférent: leur réussite nous fascine mais leur cellulite nous rassure. Un bon héros doit posséder un soupçon d'anti-héros car la perfection l'exposerait à l'agacement, voire à la vindicte populaire. Paradoxalement donc, l'ego perdure même si l'on est engagé dans un processsus de déni de soi.
La création de la caste des people, à la manière de la loterie nationale, répond essentiellement à un seul objectif: répondre à la vacuité du quotidien des masses en assurant la promotion d'un ailleurs idéal. Car cette presse a bien compris que, même dénué de tout, l'espoir fait vivre et s'avère ainsi vital, particulièrement lorsque l'on met tout en oeuvre pour s'oublier...

Trendance

jeudi 7 février 2008

"Un poème dédié à Saint Valentin et à Fred" par Trendance

Enfin... l'éclat de ton rire, la splendeur de ton âme...
Et toujours ce mystère insondable fleurtant avec un Absolu obsédant:
La présence glaciale de ton absence diurne!
Mais, chaque soir, tel le vaisseau au long cours
Se repaissant de l'accueil chaleureux du phare familier,
J'exorcise les spectres de la mer tumultueuse du Quotidien
Et envisage déjà les mille plaisirs auxquels, lové au creux de ton Amour,
Bientôt je vais m'abandonner.

Trendance